Creux-du-Van

Le Creux-du-Van, magnifique cirque rocheux symbolisant le canton de Neuchâtel, est victime de sa popularité.

La fertilisation des pâturages du Soliat, a conduit à une importante diminution des gentianes et des orchidées.

Le piétinement lors des randonnées et autres promenades entre le mur et la falaise a fortement endommagé la flore, la détruisant même totalement par endroits.

Après des années de réclamations, l'Etat a enfin mis en consultation un plan de protection du Creux-du-Van (PAC). Nous saluons cette démarche. Ce plan ne permet toutefois pas encore une protection optimale du site. Nous demandons entre autres:

  • l'abandon de toute fertilisation sur le Plateau du Soliat;
  • une meilleure protection de la flore entre le mur et la falaise;
  • un tracé du parcours VTT qui ne traverse pas le pâturage et les prairies sèches;
  • l'impossibilité de construire de nouvelles installations;
  • l'interdiction de la chasse.

Notre prise de position complète au sujet de ce PAC (février 2017)

Article du Dahu "Yourtes au Creux-du-Van: nouvelle saga juridique?" (2015)
Article du Dahu "Le Creux-du-Van au centre de bien des convoitises" (2013)
Communiqué de presse "Le Creux-du-Van n'est pas un parc d'attraction" (2013)

 


Creux du Van : Que veut-on protéger au juste ?

On entend souvent : « Avec ces drônes et ces VTT, le Creux du Van, c’est devenu le Far West, faut vraiment faire quelque chose ! ». On entend aussi : « Z’allez quand même pas interdire aux gens d’aller voir la falaise quand même ! » Certains attendent de leur balade au Creux du Van un ressourcement dans une nature paisible, d’autre recherchent une poussée d’adrénaline en s’approchant de la falaise. Ces exemples de diversité dans les attentes que chacun a de cet endroit nous amène à nous interroger sur ce que nous cherchons à protéger au Creux du Van.

Chaque promeneur a ses propres raisons de visiter le site. Toutefois, rares sont ceux qui s’intéressent à ce qu’ils ont sous les pieds, or le Creux du Van abrite une flore unique. En raison de grandes différences de températures, on trouve des conditions très variées sur seulement quelques dizaines de mètres. Au Creux du Van, on assiste à la rencontre de deux courants migratoires, l’un provenant du sud-ouest et l’autre du nord-est. Chacun de ces courants apporte son lot de fleurs, qui grâce à la grande diversité des sols et des climats, trouvent toutes des conditions propices à leur développement. On rencontre ainsi côte à côte deux espèces de gentianes, l’une aimant les sols calcaires (la gentiane de Clusius) et l’autre les sols acides (la gentiane de Koch). Au début du XXe siècle, on évoquait ces pâturages « qui bleuissaient en mai à la floraison des gentianes printanières et de Koch, puis blanchissaient en juin avec les anémones à fleurs de narcisses et les pulsatilles des Alpes. » Dans les années 1960, on parlait encore d’innombrables androsaces lactées dans les pâturages du Creux du Van. Philipe Küpfer, professeur honoraire de botanique à l’Université de Neuchâtel se souvient : « des trop rares balades à pied au début des années cinquante, depuis Noiraigue, avec comme seul objectif le bonheur de s’accroupir pour sentir le parfum de l’Orchis vanillé, déjà auréolé de sa notoriété de plante rare, ou la fierté de rapporter sur le littoral une ‘pive’ piquetée de fleurs de gentiane acaule, sans avoir l’impression de déflorer la nature tant elles étaient nombreuses ». 

Malheureusement, cette incroyable richesse floristique n’est plus qu’un souvenir. Bien des marqueurs de l’histoire botanique du Creux-du-Van sont en voie de disparition totale. La fertilisation, le girobroyage, la surfréquentation et l’abroutissement par les bouquetins ont mis à mal cette flore exceptionnelle. L’effet du girobroyage est de concasser toutes les pierres et les souches de manière à niveler le pâturage, supprimant d’un seul coup les creux et les bosses où prospéraient côte à côte des plantes aux exigences différentes. Fertiliser le pâturage a également beaucoup nui à la flore, peu de plantes supportant l’engraissement. L’une des seules fleurs supportant bien les engrais est le pissenlit. Il forme de jolis tapis jaunes en avril, mais ensuite : fini. Plus d’autres fleurs pour prendre le relai durant la suite de la saison et c’est tant pis pour les papillons et les abeilles. Non gérée, la fréquentation du public est surtout problématique entre le mur et la falaise. Le piétinement des promeneurs a amené par endroits une disparition totale de la flore. Comme si cela ne suffisait pas, les rares plantes qui ont trouvé refuge dans les vires rocheuses sont broutées par les bouquetins, qui sont rappelons-le, une espèce introduite dans le Jura.

Cela dit, les plantes ont plus d’un tour dans leur sac et possèdent une faculté merveilleuse, celle de produire des graines capables de résister des années en milieu hostile. Ces graines existent toujours dans le sol et ne demandent qu’à germer une fois que les conditions seront redevenues favorables. On a pu faire germer le blé des pharaons, il n’y a aucune raison que les graines des gentianes et des pulsatilles ne puissent pas faire de même si on leur en donne l’occasion. Le WWF a confiance dans la nature et s’engage pour lui donner un maximum de chances. C’est pourquoi, il préconise un arrêt total de la fertilisation, autre que celle du bétail pâturant, ainsi qu’un accès limité à quelques points de vue entre le mur et la falaise, de manière à donner à cette flore exceptionnelle une chance de retrouver sa beauté d’antan.

Source de cet article : Druart et al. 2010. Flores Neuchâteloises. ANFN. La Chaux-de-Fonds

Remerciements à Philippe Küpfer, Marc Burgat et Daniel Weber de leur collaboration.

Sylvie Barbalat


.hausformat | Webdesign, TYPO3, 3D Animation, Video, Game, Print